Bonjour Samuel. C’est quoi le pitch de l’application Comeet ?

Samuel Metias : Comeet est un assistant personnel qui met en relation les salariés d’une même entreprise en leur proposant de partager un moment convivial ensemble, une activité sportive par exemple, un déjeuner, un afterwork. L’idée, c’est d’utiliser les technologies pour recréer du lien social, parce que notre conviction, c’est que tu es bien dans une entreprise quand tu te sens bien avec les personnes avec qui tu travailles.

Raconte-nous, c’est quoi l’idée de départ ?

Samuel Metias : Tout a commencé en 2016. À l’époque, j’étais à la fois salarié chez Microsoft et élu à la mairie de Colombes. Il y avait clairement un décalage de bien-être entre ces deux univers. Au quotidien, au sein d’une mairie, on peut se sentir broyé par la machine administrative. Et pourtant, ici les personnes travaillent par vocation. À l’inverse, chez Microsoft, il y a une énergie formidable, là où la vocation n’est pas forcément ce qui motive au départ à postuler.

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L’engagement et la motivation ont alors commencé à me poser question. Et c’est en suivant l’atelier Happy at Microsoft que j’ai ressenti l’élément déclencheur : le bien-être en entreprise repose sur le lien social. Cette idée est devenue pour moi une conviction. J’étais même intimement convaincu que c’était le levier d’engagement le plus important, sans alors avoir aucune preuve de cela !

Alors tu as créé Comeet…

Samuel Metias : Pas tout de suite. C’est bien d’avoir des idées et des convictions, mais encore faut-il qu’elles soient rentables ! J’ai d’abord fait beaucoup de recherches, j’ai lu des études et j’ai découvert que le bien-être de 1000 salariés pouvait permettre de faire des économies plus de 2 millions d’euros par an. Il y avait donc là un vrai enjeu économique pour les entreprises. Mais cela ne suffisait pas. La question essentielle était : comment amener du bien-être ? Avec quel levier ? Pour moi il était évident que cela se passait au niveau du lien social. Mais encore une fois, ce n’était encore qu’une intuition.

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Il a fallu attendre décembre 2018, pour en avoir la preuve, deux ans après la création de Comeet ! Lors des Trophées de la Qualité de vie au travail, dont nous sommes lauréats dans la 1ère catégorie et coup de cœur du public, Malakoff Médéric a alors révélé les chiffres de sa dernière étude, et devine quoi ? Le lien social est le 1er levier de bien-être, loin devant les autres.

Pour toi aujourd’hui, le lien social manque dans les entreprises ?

Samuel Metias : Clairement, les gens sont isolés. Même en open space ou flexoffice, ils n’osent plus se parler. La faute, en partie, au digital ! Beaucoup de relations humaines se sont délitées, les écrans sont un vrai problème, ils constituent une barrière entravant la communication. Attention, je ne dis pas non plus que le digital est un fléau, il a de nombreux avantages, mais il ne permet pas de créer une relation. Pourtant il fait partie de nos vies, nous ne pouvons pas faire sans. Alors, nous avons pris le parti de mettre le digital au service de l’humain. Et nous avons créé une application pour sortir de l’isolement au bureau, en proposant aux salariés de se retrouver autour d’une activité. Partager une activité, c’est créer les conditions dans lesquelles tu es le plus à l’aise possible pour tisser une relation. Pour monétiser l’application, nous nous sommes adressés aux entreprises en leur proposant de personnaliser l’expérience collaborateur en créant de la transversalité.

Les réseaux sociaux et en particulier les réseaux d’entreprise ne jouent-ils pas ce rôle justement de lien social ?

Samuel Metias : Pour qu’un réseau social fonctionne, il lui faut des milliers d’utilisateurs, il lui faut atteindre une masse critique pour espérer avoir des réactions. Le réseau a besoin que les utilisateurs soient réactifs. Or, nous, nous sommes exactement l’inverse d’un réseau social. Comeet c’est un assistant, qui est proactif au lieu d’être réactif. Enrichie d’intelligence artificielle, notre application te propose des activités sur ton lieu de travail et te met en relation avec des personnes souhaitant faire les mêmes activités.

Et les données, vous les protégez ou, comme un réseau social, vous les exploitez ?

Samuel Metias : Surtout pas ! Nous avons décidé de ne pas stocker de données, d’abord parce qu’elles peuvent vite devenir obsolètes, ce qui peut diminuer la pertinence de notre algorithme, et puis par souci de préservation de la vie privée de nos utilisateurs. Notre système repose sur l’autorisation de lire les informations provenant des profils des utilisateurs sur les réseaux existants. Cela nous permet de générer nos propres données avec un système d’apprentissage de « deep learning ».

Tu as créé le mouvement happytech qui fédère les acteurs du bien-être en entreprise. Que veux-tu dire ? Que technologie et bien-être sont des mots qui vont très bien ensemble ?

Samuel Metias : À mon sens, technologie et bien-être sont loin d’être antinomiques. J’ai une vision très pragmatique. Les technologies font partie de nos vies, il est impossible d’y être réfractaire. En revanche, il faut à mon sens orienter la digitalisation dans le bon sens. Il y a une façon d’orienter la technologie pour qu’elle soit utile, pour qu’elle soit au service du bien commun. C’est pourquoi j’ai co-créé avec mon associé Pouya Mohtacham l’association française happytech qui fédère aujourd’hui 50 solutions innovantes dans le bien-être en entreprise. L’objectif, c’est de pouvoir valoriser et labelliser ces initiatives, de créer des événements qui permettent de partager les expertises. L’association se développe et on ouvre actuellement en Suisse et à Barcelone !